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Cancer de l’œsophage : quelles sont les difficultés des patients en termes de nutrition ?

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La dénutrition est fréquente au cours du cancer de l’œsophage. La dysphagie progressive, puis les traitements, ont notamment un impact significatif sur l’alimentation. Or, il est démontré que la dénutrition réduit l’efficacité des traitements et la qualité de vie des patients. La prise en charge nutritionnelle est donc essentielle, et a prouvé son efficacité. Les études ont montré en effet que les interventions nutritionnelles préopératoires précoces réduisent l’incidence des complications et les durées d’hospitalisation, tandis que la nutrition entérale à domicile en post-opératoire améliore le statut nutritionnel des patients et leur qualité de vie, diminue la fatigue et réduit le risque de survenue de pneumopathie post-opératoire. Pendant la chimiothérapie et la radiothérapie, la prise en charge nutritionnelle permet de maintenir le statut nutritionnel, réduit la toxicité des traitements et améliore leur efficacité.

Cette prise en charge n’est toutefois pas simple, car elle doit faire face à plusieurs variables individuelles, parmi lesquelles les habitudes alimentaires, les symptômes gastro-intestinaux ressentis et les facteurs psychologiques. De nombreuses études ont traité de la prise en charge nutritionnelle sous ses différents aspects quantitatifs, mais sans tenir compte de l’expérience subjective des patients. Une équipe chinoise vient de publier les résultats d’une revue des études publiées traitant des expériences, en termes de prise en charge nutritionnelle, des patients atteints de cancer de l’œsophage, pendant le traitement et la convalescence. L’objectif final était de comprendre plus précisément les problèmes auxquels ces patients sont confrontés, de combler le fossé entre les professionnels de santé et les patients dans la compréhension de la gestion nutritionnelle et de fournir des éléments solides pour la pratique clinique. Au total, 19 études ont été retenues, publiées entre 2002 et 2022 et incluant plus de 300 patients, 10 aidants familiaux et 15 professionnels de santé.

La synthèse des données a permis d’identifier 3 principaux points de préoccupations pour les patients : les difficultés alimentaires, les expériences émotionnelles et le support social.

Les patients et leur entourage sont en demande de conseils nutritionnels

Il apparaît en premier lieu que les symptômes digestifs et l’image corporelle varient au fil du temps et du traitement. Les symptômes en lien avec l’alimentation sont souvent plus sévères entre 6 mois et 1 an après la chirurgie, ce qui suggère que c’est dans cet intervalle que les soignants devraient être particulièrement vigilants, identifiant et éliminant les difficultés contrôlables et délivrant des informations ciblées et individualisées.

De nombreux patients relatent des difficultés alimentaires qu’ils n’avaient pas imaginées. L’intérêt pour une alimentation correcte améliore aussi non seulement le statut nutritionnel, mais le fonctionnement psychologique et social et la qualité de vie. Cela confirme la nécessité de sensibiliser le plus tôt possible les patients à leur nutrition, d’autant que la majorité d’entre eux souhaitent être pleinement impliqués dans les décisions concernant leur alimentation et déplorent que ce n’est pas toujours le cas. Ils estiment avoir besoin de conseils sur les types d’aliments recommandés, leurs quantités et la fréquence des repas.

L’alimentation peut être une source d’émotions négatives, d’anxiété ou de doutes, accentués quand les difficultés s’aggravent du fait des effets secondaires des traitements. Cela se traduit par des habitudes alimentaires inadaptées, une mauvaise image corporelle et des symptômes digestifs, s’accompagnant souvent d’un manque d’informations et de support psychologique. Au retour à domicile, les difficultés d’alimentation peuvent induire un isolement social, accentué par le comportement de l’entourage qui s’avère bien souvent surprotecteur. Des émotions positives sont toutefois signalées aussi, particulièrement quand le traitement entraine une amélioration dans les possibilités de s’alimenter.

Notons enfin que la majorité des patients et de leur entourage déplore le manque d’aide et de supports nutritionnels pendant la chimiothérapie et le retour à domicile, et le manque de formation des soignants concernant l’alimentation.

Pour les auteurs, ces données illustrent la nécessité de protocoles d’intervention personnalisés en nutrition, dans l’idéal mis en place par une équipe pluridisciplinaire, afin de créer un environnement favorable à la nutrition et optimiser la thérapie nutritionnelle, démarrant le plus tôt possible et accompagnant le patient tout au long de son traitement et à son retour à domicile.

 

Synthèse de publication réalisée en collaboration avec l’entreprise Nutricia.

Dr Roseline Péluchon

Wang, X. et al. Experiences and requirements in nutritional management of patients with esophageal cancer: a systematic review and qualitative meta-synthesis. Support Care Cancer 31, 633 (2023).